Lune de miel en enfer

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Les vingt-et-une nouvelles qui constituent ce recueil de Fredric Brown ne détonnent pas dans son œuvre au ton si caractéristique, marquée par un sens abouti de la chute - relisez, pour vous en convaincre, l’excellent « Fantômes et Farfafouilles ». L’humour quasi-permanent dont il fait montre, comme à l’accoutumé, ne l’empêche pas néanmoins d’aborder toute une série de thèmes on ne peut plus graves. A commencer par la propension qu’a l’humanité à vouloir s’autodétruire. Il ne faut pas oublier que ces récits ont été rédigés aux pires moments de la Guerre Froide, période durant laquelle le péril atomique faisait planer sur Terre une menace des plus palpables. Il est donc remarquable, dans ces circonstances, que l’auteur soit parvenu à nous communiquer le sérieux de la menace sans pour autant négliger la drôlerie nécessaire à désamorcer l’aspect potentiellement sentencieux du propos.


Il ne faut souvent que quelques pages à Brown pour atteindre le but qu’il s’est fixé – que ce soit la surprise, le rire, la stupéfaction, ou bien encore la méditation. L’imagination du lecteur se charge bien volontiers de combler le tableau. En effet, seuls deux ou trois textes dépassent les trente pages. La plupart du temps, le tout est expédié (sans connotation péjorative aucune) en quatre pages à peine. Des tours de force en miniature.

Quelques exemples :

Du jour au lendemain, un inexplicable déséquilibre des naissance surgit dans l’ensemble des pays du globe. Il ne naît plus d’humains mâles. Dans ces conditions, il ne faudra pas longtemps avant que l’espèce tout entière ne passe aux oubliettes de l’histoire. Des extra-terrestres seraient-ils à l’origine de ce phénomène ? C’est ce que vont tenter de découvrir deux « volontaires » (un Américain et une Russe), envoyés sur la Lune pour enfanter un garçon…

Des vampires persécutés traversent les âges à bord d’une machine à voyager dans le temps. Ils atteignent un futur lointain, dans lequel la notion même de vampirisme a été oubliée. Ils vont enfin pouvoir se nourrir tranquillement. Seulement, ce ne sont plus les hommes qui règnent sur la planète, mais une espèce végétale descendant du navet…

Un étudiant peu calé en géométrie décide, en désespoir de cause, à la veille d’un examen crucial, d’invoquer un démon pour lui venir en aide. Mais quelle est la différence, déjà, entre un « pentagramme » protecteur et un « hexagramme » ?

Imaginez que vous soyez un athée convaincu. Seriez-vous prêt cependant à signer un papier à un inconnu, papier qui stipulerait que vous lui vendez votre âme pour treize malheureux dollars ?

Autant de prémices auxquels Fredric Brown se charge avec talent d’apporter des développements bourrés d’inventivité.

Fredric Brown, Lune de Miel en Enfer, 364 p., Denoël

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Commentaires

Fredric Brown est un écrivain exceptionnel, hélas pas assez connu. Merci de parler de lui.

J’ai lu ce recueil et je confirme que tous les textes sont excélents. Le clou est pour moi celui qui met en scène un duel entre un humain et un alien (l’un des rares textes longs).