KERLIDOU Alain 01

Auteur / Scénariste: 


Bonjour Alain Kerlidou. Nous sommes ici pour faire connaissance. Qui êtes-vous ? Qu’est ce que vous pouvez me dire sur vous ?

Bonjour, d’abord. Qu’est-ce que je peux dire sur moi ? Je suis breton et ma passion depuis mes 12 ans, c’est Merlin, le roi Arthur. J’ai été bercé par les élémentaux, dirons-nous, et j’ai pris le pari d’essayer de vivre ma passion.

Vous faisiez quoi ? Vous avez plusieurs casquettes. Vous avez créé une maison d’édition ?

Oui. Nous allons faire par ordre chronologique. J’ai un bagage marketing : c’est la vente. Durant le début de ma vie active, j’ai vendu beaucoup de choses. Quand j’ai eu trente ans, j’ai eu le choc de la trentaine. Donc, j’ai créé mon entreprise, Avalon. J’importais du Royaume-Uni des bijoux, des tee-shirt sur le thème celtique pour en vendre aux commerçants. J’avais deux à trois cents clients en France. Depuis 2002 nous avons évolué vers l’édition. Après trois livres la première année, nous sommes passés à quatre. Et je me suis mis à l’écriture en 2005. Quand j’écris, c’est pour créer du merveilleux. Je n’ai rien à prouver, mais j’aime bien quand mes lecteurs entrent dans mon monde merveilleux. Pas du folklore, de la création ! 2008 sera l’année du roman.

Vous avez commencé sur le tard. Pourquoi cette envie d’écrire ?

Parce que, pour être franc, auparavant, je donnais mes idées aux auteurs. Et chacun rebondissait, donc on me proposait des livres avec une idée initiale qui venait plus ou moins de moi. Je me suis alors dis : « je garde mes idées pour moi ».


Vous avez fait de l’import. Comment est venue l’idée de créer une édition dans ce style là ? Vous avez été sollicité par des auteurs ?

Non, du tout. C’est sûr que de commencer sans auteur, c’est dur. J’aurais pu commencer par écrire. J’ai élaboré un plan d’évolution, une stratégie de développement. Je me suis dis : « mieux vaut ne pas m’auto-éditer ». Donc, une volonté de chercher des auteurs. D’abord, pour éditer des auteurs, illustrateurs ou écrivains, mais aussi pour pouvoir trouver un diffuseur. En six mois, j’ai pu en trouver un, ayant dix-huit commerciaux en France, Suisse et Belgique. Depuis deux ans, j’ai trouvé un importateur pour le Québec. En finalité, nous avons eu une collection d’auteurs et non une collection « Alain Kerlidou ».

Comment avez-vous fait pour trouver des auteurs ?

Et bien ça, c’est un peu la magie de la vie. Des rencontres sur des salons. Alors, plus on fait de salons, plus on rencontre des personnes. Plus on édite, plus on est connu et plus on a de la demande.

Quel est votre style éditorial ?

La ligne éditoriale, c’est la féerie dans le sens large du terme. Se faire plaisir. On sent qu’un écrivain est bon par plaisir et non par nécessité. En fin de compte, c’est pour assouvir notre passion. Ce qui nous permet de continuer, c’est la passion de la féerie, la passion d’écrire, la passion du verbe, de l’image.

Vous m’avez dit que vous avez été bercé par Merlin, toutes ces histoires. Cela vous a plu dès le départ ? Pourquoi cela vous a plu ?

C’est un lien qui s’est créé. Pourquoi ? Je ne sais pas.

Et qu’est-ce qui vous attire ? Quel est ce lien ?

Ce n’est pas une attirance. Pour moi, c’est une présence. J’ai toujours été un peu joueur. J’ai beaucoup d’imagination, c’est sûr. Lors de mes promenades quand j’avais dix, douze ans, quand il y avait une fougère qui s’agitait, mon père disait : « Ah ! Tu l’as vu ? Le lutin, le korrigan ! Oh, c’est bête, tu l’as raté ! » Évidemment, l’explication rationnelle devait être un oiseau perché qui s’est envolé ou un renard, un mulot, mais c’est une interprétation. Tu as l’imagination et la vérité. C’est un choix.


Dans ce monde-là, quel votre personnage favori ?

Merlin.

Pourquoi Merlin ?

Pourquoi Merlin ? Ce que les jeunes découvrent dans Harry Potter, je l’ai découvert bien avant dans Merlin. Merlin, grâce à la magie, il peut modifier l’environnement. Pour moi, la traduction de tout cela, c’est que la magie est en nous. On peut tout grâce au travail, à la persévérance. Voilà.

Vous pouvez peut-être nous parler de quelques-uns des romans que la maison d’édition a publiés. Et peut-être quelques-uns de vos livres à vous ?

Oui, mais je ne vais pas commencer par moi. Par politesse. Je vais présenter une nouvelle collection : « polar grimoire ». « Ankou, lève-toi » et « Terminus Brocéliande ». Du vrai polar, une enquête contemporaine, intrigue, mais la grande nouveauté par rapport aux polars que l’on trouve sur le marché, c’est que les auteurs ont su introduire la notion du merveilleux. Le lecteur va se poser la question : Qui ? Un humain ? Un fantôme ? Un korrigan ? Nous avons aussi édité un auteur belge, Guillaume Van Meerbeck. Lui, c’est une saga en cinq tomes : « Dormaë ». C’est un mélange de sorciers, plein de races, des nains, des elfes, des humains. Le thème flirte avec l’univers de Tolkien. Bien écrit. Ce que j’ai aimé ? J’aime bien avoir envie de connaître la suite. Ça, c’est une qualité pour un livre.

En novembre, je me suis permis d’écrire un petit abécédaire, une sorte de dictionnaire humoristique, mais féerique. Donc, vous allez apprendre ce que c’est une rigole, une licorne. Tout ce qui est féerique. Je rebondis sur les mots. Et puis aussi une mini-encyclopédie sur les maladies des elfes et des fées : le « Compendium Medicinalis ». Alors pourquoi un pentacle rouge, sur la couverture ? - et je vous remercie de me poser la question (Rire) - Tout simplement, j’imaginais que chez les elfes, le pentacle rouge est le même symbole que la croix rouge ou le croissant rouge chez les humains. Alors comment ça marche pour consulter l’encyclopédie ? Il faut aller à la fin. Et afin de vérifier la santé de votre lutin, vous lui poserez la question en latin : Quomodo vales hodie ? Traduction : « Comment allez-vous aujourd’hui ? ».

Et, par rapport à sa réponse, vous consulterez la page en question. Vous allez apprendre plein de choses intéressantes. D’abord, les principes généraux. Quelle est la différence entre une potion, un onguent et un suppositoire ? Ce n’est pas pareil !

Après, vous allez apprendre que les fées, elles aussi, peuvent attraper des boutons. Il s’agit de la papula juvenis. J’ai fait des recherches poussées en latin. Les sirènes quand elles nagent dans l’océan peuvent amener des puces d’eau, appelées Pulex sanguinola. Elles possèdent une armure à l’âge adulte, et on ne peut plus les écraser. Heureusement, on donne la solution : il faut traiter votre sirène avec du Petrolex. Il existe même une publicité :« avec Petrolex, adieu les Pulex ». Voilà !

Je vois qu’il y a de très belles illustrations. Vous les trouvez comment vos illustrateurs ? Ce sont aussi des Bretons ?

Les premiers oui, mais maintenant non. Nous travaillons avec les quatre coins de la France. Il y a un Parisien, un Lyonnais, un de Tour. Il y a tout le monde.


Vous avez aussi commercialisé des figurines ?

Ah ça, c’était autrefois. J’ai commencé en 1993 et j’ai arrêté en 1998.

Pourquoi avez-vous arrêté ?

Pour raisons commerciales. Faire du « business » avec les Anglais, ça devenait difficile. Notamment sur l’origine des produits. Donc, moi, j’aime bien appeler un chat un chat ou un faisan un faisan. Je ne peux pas vendre en France quelque chose de pas net. D’autre part, ils ont commencé à vendre directement à mes clients commerçants. Donc, ma raison d’être – grossiste – n’a plus lieu d’être.

Quels sont vos auteurs préférés ? Dans le genre imaginaire et général ?

J’ai lu plusieurs fois les trois tomes du « Seigneur des anneaux » de Tolkien. Comme tout le monde. Maintenant que j’écris, j’arrête de lire, parce que, justement, j’ai trop peur d’être influencé.

À part ces travaux, un petit peu d’archivage ou d’inventions sur les maladies, etc. Vous écrivez des romans, des fictions ou c’est simplement des livres comme ceux-ci ?

Pour l’instant, j’écris surtout des grimoires, des textes courts ou des nouvelles.

Pas de roman ?

Pour moi, cela prend cinq mois pour écrire un roman. Donc, peut-être que je peine, mais non. Pour l’instant, je préfère éditer des écrivains professionnels.

On en revient à vos écrivains préférés. Vous avez cité Tolkien.

Pierre Dubois. C’est vrai que sur Fr3 régionale Bretonne, il a prouvé que l’on pouvait vivre de sa passion. Et, en fin de compte, paradoxalement, j’ai toujours eu horreur de lire. Je me suis nourri pendant trente ans et maintenant, je ne lis plus, j’écris.

Comment choisissez-vous les livres qui sont édités chez vous ? Les romans par exemple ?

Je lis les manuscrits. Je n’ai plus le temps de lire d’autres livres. Je commence avoir du mal à lire les projets que je reçois. C’est pourquoi je demande maintenant un extrait pour me donner une opinion. Je veux savoir ce que l’auteur a voulu transmettre et est ce qu’on a envie de lire la suite ?

Quel est votre principal trait de caractère ?

Je suis têtu. C’est normal, je suis Breton. J’en ai plusieurs, mais bon là, il aurait fallu me prévenir pour que je prenne mon canapé pour m’allonger. (Rires) non, non. Je suis têtu, j’ai plein d’énergie, j’ai un sale caractère. Voilà, c’est suffisant.

Qu’est-ce qui vous énerve ?

Les gens bêtes et méchants.

À part l’écriture, la maison d’édition, quelles sont vos autres passions ?

Mon métier est une passion. Je travaille tous les jours. En week-end, je suis dans le salon à travailler. En semaine, j’écris le matin et après, je vais au bureau. Je m’occupe de la gestion d’entreprise. Je lis aussi ce que je reçois. Je n’ai plus le temps à faire autre chose, mais avant, j’aimais bien me promener près de la mer, dans les forêts. Maintenant, toute mon énergie, mon temps est pour ma passion.

Quel est le don que vous regrettez ne pas avoir ?

A-t-on des dons ? Moi, je ne connais personne qui en ait. Pour moi, il y a beaucoup de travail. A la base, peut-être un don ou plutôt une facilité. Certaines personnes ont une facilité pour le dessin, pour l’écriture, mais après, c’est quatre-vingt-dix pour cent de travail. Des dons, on n’en a aucun. Certains, sans travailler, dessinent des choses qui plaisent, mais le mot « don » me gêne un peu. Non, je ne regrette rien.

Quel est votre rêve de bonheur ?

Écrire un livre qui plaise autant que « Harry Potter ».

Par quoi êtes-vous fasciné ?

Par la mer. La mer, c’est vrai que quand je suis à Paris, elle me manque.

Vos héros dans la vie réelle ?

Mes héros dans la vie réelle ? Ça existe dans la vie réelle des héros ?

Vous avez le droit de ne pas en avoir.

Si j’en ai, mais dans la fiction. Mais des héros dans la vie réelle… Je n’ai malheureusement aucun héros dans la vie réelle.

Si vous deviez rencontrer le génie de la lampe magique, quels seraient vos trois vœux ?

Si j’avais des vœux à souhaiter, ça serait pour les autres. Pour moi, je n’en ai aucun.

Cela peut être pour les autres. S’il apparaissait là, maintenant et qu’il vous dit : Voilà, vous avez cinq minutes pour formuler trois vœux. Qu’est ce que vous diriez ?

Je souhaiterais que les personnes ouvrent les yeux sur le merveilleux. Parce que, c’est vrai, nous sommes dans un monde cartésien et je suis attristé de voir la mentalité de certains. C’est boulot, dodo, travail, métro, argent. Surtout argent. Pour moi, il y a des valeurs autres que l’argent. On a qu’une vie et il faut la remplir. Voilà, c’est ouvrir, ouvrir, ouvrir les yeux sur les vraies valeurs de la vie.

Ça, c’est un premier vœu.

D’accord. Deuxième vœu : prendre le temps de réaliser ses passions. Troisième vœu : que les gens prennent plus de temps pour lire. C’est vrai que, moi le premier, j’ai toujours eu horreur de lire. Et c’est vrai que le pouvoir du verbe, des mots permettent de penser différemment et d’ouvrir son regard sur une autre philosophie, d’autres valeurs et la connaissance. Voilà.

Est-ce que le boum de la fantasy en général vous a facilité les choses ?

Oui et non. Toutes personnes depuis cinq ans nous disent : « Ah ! Vous faites des choses à la mode, c’est bien ». Parce qu’ils découvrent. Moi, je suis désolé, ça fait quinze ans que je fais cela. Ça n’aide pas parce qu’il y a de plus en plus de concurrence. Quand j’ai démarré avec les figurines, à l’époque, il y avait trois dragons, deux licornes, Merlin et le roi Arthur. C’était très réduit. Alors que maintenant, tant mieux, il y a beaucoup plus de choix. Donc, c’est plus dur à vendre. C’est encore plus dur de percer parce que, c’est sûr, c’est à la mode, mais les grandes maisons d’édition proposent des beaux livres pour quinze euros. Nous, petites éditions, on imprime en France. Ça nous coûte très cher. En plus, tout augmente. Cela devient la galère. Je ne sais pas comment tout ça va finir, mais c’est de plus en plus dur.

Est-ce que votre vie est à l’image de ce que vous espériez ?

Très bonne question parce que de temps en temps, je fais un break et j’analyse ma vie. Et je dois avouer que je suis arrivé a un stade ou j’ai une vie que j’avais rêvé auparavant. Je me disais : « Tiens, si un jour, je pouvais écrire, vivre de ma passion ». C’était un vœu intime et jamais exprimé à voix haute. C’est un peu comme si la vie m’avait poussé à faire cela. Donc, pour l’instant, je n’ai pas trop de regret. Ce n’est pas simple, mais en fin de compte, je fais ce que voulais faire.

Citez cinq choses que vous aimez ?

Ma femme. On n’est pas marié, mais cela fait plus de vingt ans que l’on est ensemble. La Terre de Bretagne. J’appartiens à la Bretagne. Je ne fais qu’un avec la mer, la forêt, les rochers. Ma famille. Ça, c’est logique. La féerie, à cause de Merlin. Et j’aurais du mettre en premier des cinq, mes lecteurs. Sans eux, je ne suis rien.

Cinq choses détestées ?

Je vais me répéter. La méchanceté, la bêtise. Je vais mettre l’argent parce que l’argent rend bête, aggrave la situation. Je n’aime pas la guerre contemporaine. Avant, les chevaliers pouvaient se battre un à un et on réglait les guerres. Maintenant, on tire sur la population. Ca, je n’aime pas. Ceux qui veulent la guerre ont le droit de se battre, mais entre eux. Il y en a qui aiment ça. Par contre, les civils ne demandent rien et prennent plein de bombes sur la tête. En cinquièmement, je n’aime pas les restrictions de liberté.

Parlez-nous de vos projets, personnel en tant qu’écrivain et par rapport à la maison d’édition ?

Il y en a plein. Dans l’ordre chronologique. Les tomes deux, trois, quatre et cinq de « Dormaë ». Un par mois. Un troisième polar : « La Dame blanche était en noire ». En juin, un roman d’action. Un mélange de Bob Morane, X-Files, de séries comme ça. NCIS. L’auteur signe sous le nom d’emprunt de Philippe Le Soudéer. L’histoire : un officier de la marine française, Alan MacArthur, qui fait partie des forces spéciales, enquête sur les choses que l’État nous a cachées. Cela se passe entre réalité et fiction. Il y a plein de choses expliquées d’une façon rationnelle. Le lecteur devra faire la part entre le réel et le merveilleux. Et si tout cela était vrai ? Et il y a beaucoup de fiction aussi. Ca s’appellera le FOSEF. C’est le nom d’un organisme européen, un peu comme l’OTAN. Canadien et européen. En anglais, cela veut dire : « Fabulous Occult Sciences European Fact-finding ». En fait, ils enquêtent sur l’occulte et le merveilleux.

Vous préparez quelque chose ?

Oui, mais c’est top secret. Là, je ne peux pas. Il y a un livre sur les dragons qui est en cours depuis un an. Je suis déjà en retard. La magie des dragons. C’est un exercice très difficile. Il y a eu plein de livres sur les dragons et je voudrais apporter ma science. D’autres informations qui n’ont pas été écrites. Là, ça devient dur. C’est pour cela que j’écris, je suis content de moi.

Critique de l’abécédaire ici !

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Commentaires

Juste un petit mot pour signaler qu AK Editions de Mr Kerlidou est en liquidation judiciaire depuis le mardi 9 septembre 2008 au tribunal de commerce de Brest avec un passif de plus de 200 000 € en particulier pour non paiement des droits d’auteur au moins pour 15 d’entre eux et idem pour plus de 5 imprimeurs ... alors quand on voit ce qu’il a pu dire lors de cet interview !!! les mauvais génies se cachent souvent sous des belles apparences !!!

Cette information a été confirmée par un des auteurs lésés dans l’affaire qui nous a fait parvenir la copie de l’article de Ouest France confirmant cette triste histoire.

Il n’appartient pas à Phénixweb de polémiquer, même si nous regrettons que des auteurs et illustrateurs de qualité soient ainsi "punis". Et si nous "commentons" cette intervention c’est uniquement parce que l’interview ci-dessus est nommément citée dans l’article de Ouest France.