GUDULE 01

Auteur / Scénariste: 

Bonjour Gudule.

Bonjour.


Parlons un peu de tes pseudos. Au départ, c’était simple. Il y avait Anne Duguël pour les adultes et Gudule pour la jeunesse. Maintenant Gudule, c’est aussi pour les adultes. Pourquoi avoir changé la donne ?

Ça n’a pas été mon choix, mais celui d’un éditeur. Et, le plus drôle, c’est que les deux fois, il s’est agi du même. Quand j’ai commencé à publier en 1987, pour moi, c’était évident que toute ma production serait signée Gudule puisque, depuis longtemps, c’était mon pseudo en tant que journaliste. D’ailleurs, tout le monde m’appelait comme ça !

En jeunesse, pas de problème, mais quand j’ai sorti mon premier livre adulte fantastique - « Le Corridor », aux éditions Denoël -, Jacques Chambon, alors directeur de « Présence du futur » m’a dit : « Je prends le bouquin, mais pas le pseudo. Parce que cela ne fait pas sérieux. Les lecteurs de fantastique sont déjà perturbés quand il n’y a pas un nom américain sur la couverture, mais si en plus, c’est un nom de BD ! ». J’ai donc choisi de signer Anne Duguël qui, je le précise, n’est pas mon vrai nom. Je me prénomme bien Anne, mais « Duguël » est une anagramme de Gudule. Une manière comme une autre de rester fidèle à Gudule ! À partir de là, j’ai eu deux carrières parallèles dont l’une a beaucoup mieux marché que l’autre. Quelques années plus tard, Jacques Chambon a quitté Denoël pour Flammarion, et je l’ai suivi. Quand il a sorti « La Mort aux yeux de porcelaine », il m’a dit (à la demande de sa direction, je crois) : « Écoute, ce serait pas mal si tu signais aussi Gudule tes livres pour adultes. Gudule, on la connaît, tandis que Duguël est une inconnue, sauf pour un tout petit cercle de lecteur de fantastique ». J’ai donc « suicidé » Anne Duguël au profit de Gudule.

Ceci dit, toute cette histoire m’a bien amusée. Les pseudos, j’adore ça. Je les multiplie. J’ai publié un certain nombre de nouvelles sous le pseudo de Lili Bidault, ce qui a fait mourir de rire mon facteur (Rires).

Ta trilogie sur les fées et Merlin est maintenant finie. Pourquoi cette idée saugrenue et vivifiante ?

Parce qu’elle se moquait des valeurs sacrées, tout simplement. « J’entartais » la légende arthurienne, en quelque sorte. J’aime bien la gaudriole. J’aime bien le gros rire. Je crois que c’est très belge.

D’ailleurs, j’ai fait pire depuis. Je viens de terminer le premier tome de qui sera sans doute aussi une trilogie. Ça s’intitule : « Regrets éternels », et là, je piétine carrément la vie éternelle. L’héroïne n’est autre que ma propre mère ! En gros, une vieille chrétienne qui a toujours mené une vie irréprochable, meurt. Et elle se trompe de paradis. Au lieu de monter au ciel, elle se retrouve dans la mythologie grecque - avec tout ce que cette religion comporte d’horreurs épouvantables pour une sainte femme. Horreurs qu’elle va d’ailleurs finir par apprécier, à force. Elle va même s’encanailler, la bougresse !

Comment le public a-t-il réagi à cette grosse farce géniale ?

Apparemment bien, à en juger par les réactions de mon entourage. Bragelonne semble content des chiffres, toute proportion gardée - une création française se vend toujours beaucoup moins bien qu’un livre anglo-saxon. Il y a deux ans, au Salon du Livre, j’ai eu un plaisir immense : un couple entre deux âges s’était mis dans un coin. La femme lisait tout haut des extraits de « La Ménopause des fées » et son mari riait aux éclats. Pour l’ego, c’est très jouissif !

Le but était atteint. Aux éditions Malpertuis tu as élaboré ta première anthologie, je crois. Comment est née cette idée ?

Cette anthologie devait sortir au départ aux Belles Lettres, qui publiait des anthologies à thèmes auxquelles j’avais participé. Un jour, le directeur de collection, Alain Pozzuoli, m’a proposé d’en diriger une. J’avais des idées de thèmes, elles lui ont plu, il m’a dit : « Banco ! » J’étais très contente, car c’était pour moi l’occasion de publier des auteurs de talent, qui ont de grandes difficultés à se faire éditer. Aujourd’hui, c’est plus facile d’écrire un livre que de le publier, a fortiori lorsqu’il s’agit de nouvelles ! La nouvelle est mal aimée en France, malheureusement. Et pourtant, quel genre magnifique ! Je reçois beaucoup de nouvelles par le Net, d’auteurs inconnus et désespérés, qui, si on ne leur ouvre pas des portes comme celles-là, resteront toujours dans l’ombre. C’est une grande perte, je trouve. Mes deux anthos, « Parfums mortels » et « Secrets de famille » ont permis a quelques-uns de ces talents méconnus de s’exprimer.

As-tu contacté des auteurs en particulier ou as-tu laissé venir les textes ?

J’ai contacté personnellement chaque auteur. L’appel à textes, ce n’est pas mon truc : j’avais suffisamment de bons écrivains dans ma manche ! J’ai d’ailleurs reçu beaucoup trop de nouvelles, il a fallu que je fasse une sélection. J’ai écarté tout ce qui n’était pas parfaitement dans le thème ou que j’estimais mal écrit (jugement subjectif, mais quel jugement ne l’est pas ?). Parmi « mes » auteurs, il y avait quelques écrivains connus — comme G.J. Arnaud dont je suis une grande admiratrice, et qui m’a fourni la perle du recueil. (C’est aujourd’hui un très vieux monsieur, qui heureusement n’a rien perdu de son génie !). Il y avait aussi des personnes qui publiaient leur tout premier texte. Des petits bijoux ! D’ailleurs, vous pouvez en juger par vous-mêmes : « Secrets de famille » se trouve sur le Salon.

Quelles étaient tes contraintes ?

Il fallait juste que les nouvelles « collent » au thème, et je ne voulais pas qu’elles soient trop longues. Vingt milles signes maximum. J’adore les nouvelles très courtes, très concises, où un univers complexes se développe en un minimum de mots. Certaines d’entre elles font une ou deux pages - je pense à celle d’Alice Michel, entre autres, qui est un véritable coup de poing.

Une antho sur l’odeur, quelle bonne idée…

Il y a des thèmes que je trouve magiques. Les odeurs, on en parle peu. C’est presque un sujet tabou. Pourtant, comme élément fantastique, cette réalité invisible, impalpable et puissamment évocatrice me semble tout indiquée. Quant aux secrets de famille... J’ai toujours été fascinée par ces mystères enfouis dans la conscience collective, qui partent souvent d’un fait anodin, et que le silence des générations successives transforme en quelque chose d’inquiétant - et même parfois d’effroyable.

Es-tu satisfaite du résultat ?

Oui. D’ailleurs, j’attends avec impatience le second recueil qui a été imprimé pour le salon, et que je n’ai pas encore vu !

Quel est le texte que tu préfères dans cette antho sur les odeurs ?

Dans celles sur les odeurs ? Oh la la ! Difficile de choisir… Il y en a une pour laquelle j’ai une double affection, c’est celle d’Olivier Ka. D’abord, parce que je l’ai trouve extrêmement réussie. Et aussi parce que Olivier Ka, c’est mon « petit garçon ». (rires)

Fan depuis bien longtemps, je ne peux m’empêcher de te demander si tu as côtoyé Marcel Gotlib ? Si oui, quel souvenir en gardes-tu ?

Il m’a appris à danser le tango ! Gotlib, c’est quelqu’un que j’aime beaucoup. Dans les années 1970, l’explosion de la BD qui, d’un média enfantin, devenait une expression d’adultes, m’a passionnée. Ça a donné Fluide Glacial, L’écho des Savanes, Charlie mensuel, enfin toutes ces revues « politiquement incorrectes » et follement jouissives. À l’époque, j’étais mariée avec le dessinateur Carali, qui sévissait dans tous ces magazines, et pour qui j’écrivais de nombreux scénarios. Parallèlement, je faisais des émissions sur la BD, sur Radio libertaire (c’était aussi le temps des radios libres !). Je fréquentais donc tous les grands « dessineux » de l’époque, dont Gotlib était l’un des plus beaux fleurons ! Depuis, on s’est perdus de vue. Nous nous sommes quittés, Carali et moi, et j’ai déserté la B.D. pour le roman…

Parlons de ton actu. Le premier volume de tes romans fantastiques « Le Club des petites filles mortes » vient de paraître. Qu’est-ce que cela te fait de revenir ainsi sur ta carrière ?

Cela m’a provoqué un lumbago (Rires). À force de regarder derrière soi, hein… Ce recueil se compose de sept romans écrits en 1995 et 1998 - plus un inédit, heureusement ! C’est ce qui me permet de ne pas être trop en décalage avec ce livre. Parce que, comme tout auteur qui écrit beaucoup, j’évolue vite. Et j’ai nécessairement un regard très critique sur mes anciens textes. C’est assez paradoxal, parce que, en même temps, je les aime. C’est eux qui m’ont construite, je ne peux donc pas les renier. Simplement, si je devais les réécrire aujourd’hui, ils seraient très différents. J’ai mûri, j’ai d’autres exigences… D’où, la présence d’un inédit qui reflète mon écriture et mes préoccupations d’aujourd’hui.

As tu relu tes textes ? Les as-tu corrigés, retouchés ?

Je les ai relus et j’ai retravaillés la plupart d’entre eux. Les plus anciens, surtout. J’ai modifié également certains titres. Ce n’est pas une simple coquetterie : quand on change le titre d’un texte, c’est une manière d’orienter différemment le regard des lecteurs dessus. Je pense, entre autres, au « Corridor » qui paraîtra dans « Le Club des petits garçons morts », sous un nouveau titre : « L’innocence du papillon ». Ou à « Lavinia », qui était sorti dans la collection « Frayeur » en 1995, et s’intitule maintenant « Repas éternel ». Jacques Chambon, à l’époque, m’avait dit : « Ton titre n’est pas bon », mais je n’en avais pas trouvé d’autre. C’est chose faite, treize ans plus tard. Comme quoi, il n’est jamais trop tard pour bien faire…

Le premier volume est dédié à Jean Rollin. Peux-tu nous expliquer pourquoi ?

Parce que la plupart des textes qui composent ce recueil sont sortis dans la collection « Frayeur » qu’il dirigeait, au Fleuve noir. C’est lui qui m’a littéralement propulsée dans la littérature fantastique. Je l’ai rencontré au moment où il créait cette collection. J’étais en pleine remise en question. Je ne publiais plus nulle part : mon directeur de collection de chez Hachette était parti à la retraite et, n’ayant plus d’interlocuteur privilégié dans cette maison d’édition, je ne m’y sentais plus à ma place. Les rapports auteur-éditeur ne sont jamais simples, surtout dans des structures aussi gigantesques… Bref, j’étais vraiment dans un moment très difficile quand j’ai fait la connaissance de Jean Rollin. Nous avons tout de suite été sur la même longueur d’ondes, et ça m’a redonné le goût d’écrire. En l’espace de deux ans, Jean m’a sorti sept ou huit livres. J’ai véritablement découvert mon goût du fantastique grâce à lui, et je lui en suis très reconnaissante. D’ailleurs, nous avons rendez-vous tout à l’heure, au stand Bragelonne, pour que je lui donne le livre. Je crois que ça le touchera qu’il lui soit dédié. « Le club des petits garçons morts », où l’on retrouvera des livres parus chez Denoël et Flammarion, sera dédié, lui, à la mémoire de Jacques Chambon. Deux éditeurs avec un « É » majuscule, sans qui je ne serais pas là aujourd’hui…

Dans sa préface, Jean-Michel Archambault te compare à Marc Agapit.

Un auteur un peu oublié je trouve.

Oui. Je trouve cela très flatteur (Rires). Ça me touche énormément qu’on me compare à ces monstres sacrés !

Il y aura combien de volumes ?

Deux, qui rassembleront seize romans sur la vingtaine que j’ai écrits. Les « absents », soit ne sont pas fantastiques, soit sont encore exploités par d’autres éditeurs.

Tu es déjà une ancienne dans le monde de la SF francophone. Quel regard portes-tu sur ce milieu ?

Oh là là ! La question-piège ! Je vis tellement à part, tellement loin de tout et de tous ! La notion de « milieu » m’échappe, dans mon petit trou du Tarn, le nez sur mon écran… Disons que, dans les jeunes qui émergent aujourd’hui, il y a des talents qui me bluffent. Je pense en particulier à Mélanie (Fazi, NDLR). Elle a une sensibilité extraordinaire. Elle vient de sortir deux recueils de nouvelles que j’ai adorés. C’est son nom qui me vient en premier à l’esprit parce que je suis en train de la lire, mais elle est loin d’être la seule ! je vous citerai, je ne sais pas, moi : Christophe Lambert, Sire Cédric, Jean-Michel Calvez, Didier Rougeyron, Fabrice Colin… Ou nos « Grands Anciens » : Brussolo, Pelot, Joëlle Wintrebert, Jean-Pierre Hubert, Andrevon… J’ai le souvenir d’un article paru dans « Le Monde », il y a quelques années, où un éditeur que je ne nommerai pas affirmait d’une manière péremptoire quele fantastique français n’existait pas. Je lui en ai beaucoup voulu, parce que c’est faux, archifaux. Nous avons un fantastique spécifique, différent du fantastique américain ou anglo-saxon en général, mais tout aussi valable. Le nier, c’est nier notre culture, et tous les formidables talents qu’elle a engendrés et engendrera encore !

Quels est l’élément déclencheur qui fait naître tel ou tel roman, telle ou telle thématique... Ainsi, Jonathan Littell a eu l’idée des Bienveillantes en voyant la photo d’une jeune russe martyrisée pendant la dernière guerre. As-tu des éléments déclencheurs, des faits, des objets... Une oeuvre d’art.... ?

Je suis incapable de dire ce qui va déclencher une idée. Parfois, c’est un fait minuscule qui me reste en mémoire et s’y développe un peu comme une tumeur, à mon insu. Mais « l’inspiration » (quel mot galvaudé !) reste pour moi un phénomène inexplicable, mystérieux et magique. Quand je relis un roman que je viens de terminer, je me dis toujours : « Ce n’est pas moi qui ai fait ça ! Où j’ai été chercher des idées pareilles ? Comment est-ce possible ? ». On doit avoir à l’intérieur de nous des espèces de marécages dont un monstre sort de temps en temps. Parfois, on l’attrape au passage ; parfois, non. C’est Pierre Pelot qui compare les idées à des papillons qui nous survolent, et que l’on peut capturer ou laisse passer selon notre état d’esprit du moment. Cela me paraît une image assez proche de la réalité.

Quels sont les derniers livres que tu as lus et que tu recommanderais ?

J’allais dire les deux recueils de nouvelles de Mélanie Fazi, mais j’en ai déjà parlé. Et aussi « Cahier-décharge », un livre extraordinaire de Pascal Francaix. Tu le connais ?

Je ne l’ai pas encore rencontré.

Pascal est un auteur absolument admirable. Il réinvente le langage à la manière d’un Raymond Queneau, mais lui, c’est à travers le patois du Nord de la France et de la Belgique. Son dernier livre, « Cahier-décharge », vient de sortir chez Baleine. C’est un roman hallucinant. Outre l’écriture admirablement maîtrisée, il parvient, dans les trois dernières pages, à retourner le lecteur comme une chaussette, passant de l’abjection à la dérision en un claquement de doigt. Tout comme moi, Pascal doit beaucoup à Jean Rollin. Il a publié ses premiers livres dans la collection « Frayeur », puis est passé chez Denoël, avec Jacques Chambon. Son splendide « Mères noires » a eu le prix Gérardmer-fantastic’art. Maintenant, il publie chez Terres de Brumes, chez Octobre et chez Baleine. Il fait partie de ces auteurs éblouissants et, malheureusement, trop méconnus dont je parlais tout à l’heure.

Tes projets ?

La future trilogie de « Regrets éternels ». J’attends que le « Club des petits garçons morts » soit paru pour la proposer à Bragelonne. J’adorerais que le premier tome sorte en 2009, mais ce n’est pas moi qui décide… Sinon pour la jeunesse, ça continue : des romans, des contes, des albums…

Et maintenant les questions « Si j’étais » :

Un livre ?

Ohlà là ! Je serais peut-être un livre dans lequel je me suis longtemps retrouvée. C’est terrible comme question. En plus, je suis à moitié endormie avec cette foule…

Cela va te réveiller

« Les petits enfants du siècle » de Christiane Rochefort. Il n’a rien à voir avec le fantastique mais est visionnaire d’un point de vue social. Le social et le fantastique, ce sont mes « chevaux de bataille ». Quand les deux genres se côtoient, j’adore !

Une loi ?

Grand Dieu ! Si au moins, j’avais pu me préparer… Si j’étais une loi, ce serait pour la piétiner de toute manière.

Dieu ?

Si j’étais Dieu, je changerais tout instantanément, mais comme je ne crois pas en Dieu, c’est un peu embêtant. Je ne croirais pas en moi.

Le Père Noël ?

Vu ce que je lui fais dans « Géronima Hopkins attend le père Noël », vaut mieux pas m’en parler, de çui-là !

Une chanson ?

Là, tu me tues ! Ce serait peut-être « La mauvaise réputation » de Brassens.

Un acteur ?

Oh ! Peut-être Michel Simon. Encore une mauvaise réputation…

Un homme ?

Je serais un transsexuel.

Un continent ?

Bah, la bonne vieille Europe.

Une recette de cuisine ?

Une tarte à la crème (entre les mains de Noël Godin !)

Un coffre-fort (qui contiendrait quoi) ?

Rien du tout.

Une porte (qui s’ouvrirait sur quoi ?)

Là, il y a plein d’images qui me viennent. Une porte qui s’ouvre sur une chambre à coucher, disons. Sans préciser ce qu’on y fait, nous sommes entre gens du monde !

Un souvenir ?

Un souvenir d’enfance. Tu veux que je te raconte ?

Oui.

Au musée d’arts et d’histoire du Cinquantenaire (NDLR : à Bruxelles) il y avait une reproduction de tombe, grandeur nature. Celle d’un ministre de je ne sais plus quel pharaon. Un endroit fascinant, labyrinthique, couvert de fresques et de hiéroglyphes. J’allais m’y perdre pendant des heures, et je restais là, assise par terre, à imaginer des choses. A essayer de capter l’ambiance de l’Antiquité. J’ai même commencé un roman qui s’intitulait : « Moi, l’Egyptienne ». Je devais avoir une dizaine d’années. Moi, les musées m’ont fabriquée.

Un événement à changer dans le monde ?

J’assassine Hitler, allez hop !

Dans ta vie ?

Aucun. J’ai une vie qui me plaît d’un bout à l’autre. Si j’en changeais un, tout changerait et ça, je ne le veux surtout pas.

Une paire de chaussettes (qui couvrirait les pieds de qui) ?

Jolie question… Heu… Johnny Depp… ?

Une blague ?

Une blague complètement salace dans le genre de celle que Véronique m’a racontée tout à l’heure.

Un alcool ?

Du rhum. J’adore les punchs.

Un attentat ?

Alors là, il y en aurait un paquet ! Ça la foutrait mal de dire : contre Sarkozy ?

Si tu veux… Une gourmandise ?

Un cuberdon.

Une invention ?

Je ne vais pas dire le préservatif, quand même !

Pourquoi pas. Un tableau ?

L’origine du monde.

Un complexe ?

Celui d’Œdipe, bien sûr !

Un paysage ?

Je serais tentée de répondre : le mien, la vallée du Tarn. Je suis amoureuse de ma région.

Un jeu d’enfant ?

La marelle.

Un super héros ?

Catwoman.

Un médicament ?

L’aspirine.

Un être mythologique ?

Mon préféré, c’est Silène, l’ivrogne invétéré, fêtard, paillard, roteur, péteur et forniqueur. Mais bon, à la réflexion, ce n’est pas très flatteur. Je préférerais m’identifier à Vénus.

Une épitaphe ?

Il y en a des belles, mais là, je cale.

Si cette tombe rigole, c’est qu’elle abrite Gudule ! (Suggestion de Véronique qui assistait à l’entretien, NDLR).

Vin rouge ou vin blanc ?

Blanc.

Rêve ou cauchemar ?

Rêve. Je ne fais jamais de cauchemar. Je les écris.

Oreiller ou traversin ?

Oreiller.

Un grand regret ?

J’ai eu très longtemps un grand regret dans l’édition. C’est celui de ne pas avoir compris ce que l’on attendait de moi. Mon premier roman, qui s’intitulait « Autopsy d’une conne » avait séduit Françoise Verny, qui était alors la papesse de l’édition française. Une femme étonnante, au physique d’ogresse, qui avait lancé les plus grands écrivains— mais ça, je l’ignorais : je n’ai jamais été très « parisienne ». Elle m’a reçue dans son bureau et m’a lancé : « J’ai adoré votre roman, mais il faut tout me réécrire ». Je me suis dit :« Elle est folle » et je suis partie sans demander mon reste — et sans comprendre qu’elle me tendait une perche fantastique, la même que celle qu’elle avait tendue à Bernard-Henri Lévy, par exemple. Je ne l’ai jamais recontactée. Elle, si : elle m’a retéléphoné trois fois, et ne m’a jamais pardonné d’avoir « fait la morte ». Par après, quand j’ai réalisé ce que j’avais loupé, je m’en suis mordu les doigts. Mais en même temps, si j’avais su saisir cette opportunité, je n’aurais jamais écrit du fantastique ou de la jeunesse. Donc, c’est un faux regret. Je l’ai traîné longtemps derrière moi comme un boulet, puis j’ai trouvé ma voie. Maintenant, je ne regrette plus rien.

Un écrivain qui t’impressionne ?

Il y en a beaucoup. Au hasard, Steinbeck.

Avec qui es-tu fâchée dans le milieu littéraire ?

Avec personne. Si, le fantôme de Françoise Verny.

Le film que tu pourrais voir mille fois ?

Il y en a plein. « Le Père Noël est une ordure » entre autres. Un film potache - et remarquablement bien écrit - que j’aime à la folie.

Ta dernière indignation ?

La connerie d’avoir Israël comme invité d’honneur, ici au Salon du Livre de Paris 2008. Ce n’était pas le moment. Faut pas titiller les passions. Dans un an ou deux, peut-être…

Ton premier baiser ?

C’était le jour de mes treize ans avec un petit garçon qui en avait quatorze. Nous étions dans le noir, et au meilleur moment, la lumière s’est s’allumée et son père est entré. J’ai cru mourir de honte.

Ton doudou d’enfant ?

Ça, c’est très amusant. Un éditeur m’a demandé récemment un petit texte, à inclure dans un recueil sur les doudous. Je lui ai répondu - comme à toi - que je n’avais jamais eu de doudou à proprement parler, mais un oncle Doudou. Il s’appelait Louis et on le surnommait Doudou. Il me prenait sur ses épaules et son crâne chauve était si doux que j’y posais ma joue et que je m’endormais.

Le milieu littéraire est formidable parce que ?

Parce que je suis chez Bragelonne. Sinon, avant, je ne le trouvais pas formidable du tout.

Le milieu littéraire est insupportable parce que ?

Parce que je n’ai jamais été dans le coup. Je n’ai jamais su me vendre. Je suis trop solitaire, trop décalée. Les critères « parisiens » m’échappent, je suis incapable de me plier aux mondanités et aux courbettes d’usage. Par bonheur, après des années de galère, j’ai enfin rencontré un éditeur qui ne s’arrête pas à ces détails et m’accepte telle que je suis.

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