Soleil de nuit

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Jon Hansen est un homme qui a tout raté et tout perdu. Embauché par le mystérieux Pêcheur, un puissant trafiquant de drogue de la région d’Oslo, il faillit à sa tâche et laisse filer un revendeur qui se sert dans la caisse. Celui-ci lui propose la moitié du butin en échange de sa vie, au lieu de l’abattre. Jon a une bonne raison d’accepter : il espère pouvoir payer une très lourde et très chère intervention pour sa petite fille. Peine perdue…

Pourchassé à son tour, il trouve refuge sous un faux nom dans un petit village du nord de la Norvège, entre obscurantisme et traditions religieuses poussées. Jon devient Ulf, se fait passer pour un chasseur dans l’attente de son fusil. Logé dans une cabane à la sortie du village, il se retrouve presque malgré lui mêlé à la vie des autochtones. Beaucoup se doutent qu’il cache un lourd secret, et parmi eux, la troublante Léa, jeune veuve dont le mari vient de périr en mer et qui doit élever seule son gamin de dix ans. Pris d’affection pour eux, Jon rêve d’une vie meilleure. Mais le Pêcheur ne l’a pas oublié et finit par retrouver sa trace…

Je n’hésiterai pas en disant que ce livre a été un coup de coeur ! Voilà un roman que j’ai eu beaucoup de mal à lâcher. L’histoire en elle-même est simple, sans surprise dans son déroulement, sans « page turner » (j’avoue, je n’aime pas ce terme devenu trop galvaudé). Presque un huis-clos contemplatif, où malgré les grands espaces, cette région du Finnmark ouverte aux quatre vents et soumise au soleil de nuit, on a parfois l’impression d’étouffer, comme si tout se résumait à cette cabane de pêcheur étroite et poussiéreuse.

Premier roman de l’auteur pour moi, l’ambiance n’est pas sans rappeler le film de Peter Weir, Witness, en particulier dans la relation qu’établissent peu à peu Léa et Jon, et cette barrière religieuse qui parait infranchissable tant les traditions sont ancrées, presque inscrites dans les gènes des habitants. Jon Larsen est l’exemple type de l’anti héros : c’est un dealer, un voleur, un homme dont le courage fait défaut, incapable d’user quasiment jusqu’au bout d’une arme à feu, ce qui le rend finalement beaucoup plus humain. Son drame personnel évoqué par petites touches font de lui quelqu’un qui n’a plus rien à perdre, qui en viendrait presque à appeler la mort sans avoir le courage là encore de se la donner.

L’absence d’action, en tout cas réduite à son minimum, m’a rappelé un autre auteur nordique, Arnaldur Indridason, découvert avec le Lagon noir, qui manie également l’art du contemplatif. Serait-ce l’apanage de ces auteurs ? Je pourrai bientôt m’en rendre compte à la lecture d’un autre Bordique, Ragnar Jonasson.

Au final, Soleil de nuit fait partie de ses petits plaisirs littéraires que l’on découvre parfois presque par hasard, et je remercie vivement Gallimard de m’avoir permis cette immersion norvégienne. Il est certain que ce ne sera pas le dernier que je lirai !

 

Soleil de nuit par Jo Nesbø,  Folio Policier, 08/2018, 7, 25€

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