Slumdog Millionnaire


Slumdog Millionnaire est :

- Réponse A : un ratage bollywoodien boursoufflé

- Réponse B : un carton oscarisé complètement surfait

- Réponse C : un bon film somme toute

- Réponse D : une grosse claque de bonheur

Réponse à la fin de l’article. Ce que je peux déjà dire, c’est que Slumdog Millionnaire est un concentré de tout le talent de Danny Boyle. Donc ça envoie fort.


Le film commence par une scène de torture, se poursuit dans les décharges de Bombay, aligne les plongeons dans la merde, les courses-poursuites dans des labyrinthes de tôles, les cadrages vertigineux sur des bidonvilles, les mutilations en série sur des gamins pour finir dans un gunfight suicidaire au fond d’une baignoire remplie de pognon. Entre ces scènes taillées dans la plus dure réalité indienne et montées en parallèle avec un jeu télévisé débile, naît une histoire d’amour entre deux gosses magnifiques : Jamal, amoureux comme on n’en fait plus et Latika, belle comme c’est pas possible. Au milieu des deux, le frère, Salim qui complète le triangle shakespearien.

En suivant le parcours du candidat Jamal à l’émission Qui veut gagner des millions  ? (de roupies), Danny Boyle nous flanque à la figure tout un pan de la culture indienne contemporaine, sans concession à la bienséance, au politiquement correct, à l’exotisme de pacotille.
Mais surtout avec art et avec son brillant directeur de la photo : Anthony Mantle. Le cinéaste filme à l’arrache, à la SL-2K ou à la CanonCam, l’Inde dans son intimité, loin des studios et des reconstitutions, là où ça grouille, où ça pue, où ça tue. Volant des images superbes et fulgurantes qu’il booste avec une bande-son hyper-rythmée, comme toujours. Cette fois Danny a fait appel à AR Rhaman qui a composé une musique que je me passe en boucle depuis que j’ai vu le film.

Contrairement aux réalisateurs français qui cumulent les postes de scénariste et de metteur en scène pour doubler leur cachet et se la péter grave sans vraiment en avoir les compétences, Danny Boyle a toujours eu l’humilité des grands en s’adjoignant la collaboration d’un vrai scénariste. Il travailla ainsi avec John Hodge (Petits meurtres entre amis, Trainspotting, Une vie moins ordinaire), Alex Garland (La plage, 28 jours plus tard, Sunshine) et cette fois-ci avec Simon Beaufroy. Ce dernier (scénariste de Full monty et des Géants) a réussi à donner une structure narrative à une histoire romanesque indienne par nature éclatée et sur laquelle Danny Boyle a imposé son rythme effréné.


Cinéaste éclectique, capable de vous faire rire jaune, de vous glacer le sang, de se hisser au niveau de Kubrick, de vous donner envie de gerber, de vous faire rêver et cauchemarder en même temps, Boyle a toujours eu une obsession : la carence. Le réalisateur anglais est obsédé par le manque. Dans Slumdog millionnaire, il revient ainsi à son obsession première, mais laquelle exactement ?

- Réponse A : le manque de viande

- Réponse B : le manque d’argent

- Réponse C : le manque de drogue

- Réponse D : le manque de soleil

Si vous avez répondu A, c’est que vous êtes traumatisé à vie par 28 jours plus tard. Si vous avez répondu C, vous avez Trainspotting qui coule encore dans vos veines. Et si vous avez choisi D, c’est que vous avez Sunshine à l’esprit. La réponse est donc B, thème traité dans les trois premiers films de Danny Boyle, comme dans son dernier. Mais l’argent fait-il le bonheur ? Tout ce que je peux vous répondre, c’est que Slumdog Millionnaire le fait pendant deux heures.

Quant à la réponse à la question initiale, vous l’avez compris, c’est définitivement D. Ce sera mon dernier mot, Jean-Pierre.