Jolies ténèbres

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Illustrateur / Dessinateur: 


Aurore a prévu un délicieux rendez-vous avec son joli Prince Hector. Un bon chocolat chaud, deux tasses et du cake. Alors qu’ils trinquent à leur amour, de la guimauve dégouline brusquement du plafond. Des gouttes de plus en plus grosses, si grosses qu’elles finissent par envahir la pièce. Dans sa fuite, Aurore perd Hector et Plim, son fidèle serviteur. Les murs de guimauve se referment sur elle, elle suffoque, se noie et dans un geste désespérée, elle s’agrippe à la paroi. De ses petits bras frêles, Aurore parvient à se hisser à la surface et sort par une narine géante.

Dehors, une pluie violente s’abat sur elle. Tous pleins de petites créatures s’extirpent également des narines, mais aussi de la bouche et des oreilles de ce qui se révèle être une enfant morte, étendue dans l’herbe.

Que dire de « Jolies ténèbres » ? C’est déconcertant, amusant et dur à cerner. Je crois qu’il ne faut pas chercher de raison, ni de trame à cette histoire, ni s’attacher aux personnages humains qui débarqueront plus tard. L’important, c’est de vivre cette lutte pour survivre en milieu hostile de dizaines de petites créatures rigolotes.

En effet, une fois sortie du corps de la jeune fille, chaque créature devra survivre dans la forêt hostile qui les entoure. Chacun possède un trait de caractère humain bien déterminé. Il y a la peureuse qui n’osera jamais s’éloigner et finira par se nourrir des asticots qui abondent autour du cadavre plutôt que de rejoindre les autres. Il y a la perfide capricieuse qui cherche à retourner la tête de chacun. Le prince charmant qui se révèle être une grande bouche, mais un beau trouillard et surtout, un fainéant. Il y a la fille libre qui découpe et cisaille à son gré. Il y a Plim, le serviteur, la grosse gloutone qui mange tout, le trio des soeurs jumelles prises-de-tête. C’est comme si chaque personnalité d’Aurore avait pris forme après sa mort. Mais ça, c’est moi qui le suppose, car le scénario nous en dit peu à ce sujet.

L’auteur préfère se concentrer sur les réactions de chacun en milieu hostile. Affamées, effrayées, insouciantes aussi, toutes ces petites créatures vont devoir chercher de quoi se nourrir et de quoi s’abriter dans une nature qui ne leur fera pas de cadeau. Un « Lost » version conte de fées. Beaucoup mourront d’ailleurs. D’autres deviendront cannibales. D’autres encore useront de fourberie. Comme je vous dis, j’ai retrouvé toutes les facettes de personnages d’un bon Survival.

Et c’est en cela que « Jolies ténèbres » est déconcertant. Pourquoi choisir des personnages de conte de fées ? Pourquoi faire intervenir des humains par moment ? Pourquoi ne rien nous dire sur cette fille morte ?

Maintenant, une fois oublié ces questions, j’avoue qu’on se laisse porter par les aventures de la jeune Aurore et les différentes techniques dont chacun use pour survivre. Entre les scènes d’affolement, le campement improvisé, les missions de reconnaissance, l’apparition du géant, le suspense nous tient en haleine. Et comme le ressenti prime, ne cherchez pas de mystère à élucider, lâchez prise avec la raison et laissez-vous porter par vos émotions. Vous vous surprendrez même à rire.

Titre : Jolies ténèbres

Scénario : VEHLMANN

Dessins et couleurs : KERASCOET

Editeur : Dupuis

nbre de pages : 96

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