POINT Nathanaël 01

Auteur / Scénariste: 

Nathanaël Point, bonjour. Comment t’est venue l’idée de cette bd ?

C’est l’histoire d’un pari un peu fou… C’est au sein de l’association AJENA qui m’emploie pour réaliser des animations scolaires autour des problématiques environnementales qu’est né le projet… J’avais envie de parler des énergies renouvelables d’une façon différente, décalée, pour pouvoir toucher de nouveaux publics. Au départ, il y a eu ma rencontre avec l’illustrateur, alors graphiste à l’AJENA, et un voyage au Japon qui m’a permis de poser les bases de mon scénario.

Pourquoi Amaterasu ?

Je ne vais pas dévoiler le secret qui entoure le titre mais je peux vous donner des indices : allez voir du côté de la mythologie japonaise…

Pourquoi 4 mondes liés aux 4 éléments Fôret, Vent, Eau et Soleil ?

Je souhaitais parler des énergies renouvelables donc de l’énergie du bois, de l’énergie éolienne, de l’énergie hydraulique et de l’énergie solaire. J’ai donc inventé ces quatre mondes que Kywal va parcourir lors de sa quête de l’énergie vitale.

Pourquoi avoir choisi un univers magique plutôt qu’un monde réaliste ?

Ecrire un conte fantastique m’a permis d’être plus libre, d’une certaine façon, pour faire passer des messages sans m’appuyer sur de l’existant… Je ne voulais surtout pas tomber dans un discours didactique ou moralisateur. Là il s’agit avant tout de raconter une histoire et après, on peut y lire le combat des énergies renouvelables contre les énergies fossiles et leurs émissions de gaz à effet de serre.

Au cours de l’aventure de Kywal, on sent bien les divers messages à faire passer. Par exemple, l’abattage massif des arbres par les lutins. Quelle conséquence cela a sur leur monde et dans le nôtre ?

Sur leur monde, la déforestation accroît le mal invisible et dans le nôtre on peut faire le parallèle du drame de l’Amazonie et des émissions de gaz à effet de serre induits par les brûlis.

Viduline est une sorcière devenue fainéante, sédentaire et laxiste. Elle s’est enfermée chez elle. Elle n’a plus de contact avec l’extérieur, alors que son monde agonise. Que reflète-t-elle de notre société moderne ?

Dans cette scène, je voulais montrer deux choses, en effet. Le fait que cette sorcière, gardienne du fonctionnement de la machine à chaleur, perde ses pouvoirs magiques et se laisse aller se reflète dans son environnement : chaumière humide, absence d’ouverture, moisissure. Je voulais montrer là l’importance que l’on peut accorder à notre environnement intérieur et qui peut effectivement affecter notre humeur et vice-versa. Plus tard, on apprend que c’est Corbéus qui l’a charmée et laissée tomber d’où son état dépressif… C’est seulement avec l’arrivée de Kywal (marqué par l’arrivée de la lumière dans la chaumière), qu’elle va reprendre confiance en elle. Zitrorux va faire le ménage et retrouver ce qui l’empoisonnait (l’amulette symbole du lien avec Corbéus).

Viduline encore, mais aussi Rymina se sont laissées corrompre par l’or et les bijoux. Penses-tu que les choses changeront dans le monde ? Les industries de l’or et d’autres précieux minerais comme le charbon, l’uranium, le diamant, etc, ont-elles intérêt à se mettre aux énergies renouvelables ? Et si elles ne le font pas, quelle chance a-t-on de pratiquer une éco-économie selon toi ?

Vaste question ! Moi, je crois en l’éco-économie. D’ailleurs on parle de plus en plus des cleantechs qui allient modernité et écologie… C’est pour cela que je suis positif : l’homme a des ressources inépuisables avec les énergies renouvelables. Le potentiel solaire est énorme et sous-exploité par les hommes. La corruption, le jeu de séduction font partie de ces armes nécessaires dans une société basée sur la tricherie : on nous a fait croire qu’on ne pouvait envisager qu’un seul type d’énergie (épuisable), donc il fallait se battre pour y accéder. Avec les énergies renouvelables, c’est un autre mode de raisonnement qu’il faut adopter : celui du partage, de l’équité…

Dans le monde de Shintsuhiko, on voit des ouvriers elfes se tuer au travail pour extraire du Kéros, un minerai combustible utile aux Totaliters. On y voit très bien le rapport avec le pétrole de Total. Les énergies renouvelables offrent-elles de meilleures conditions de travail que celles des mineurs ? Si oui, lesquelles ?

Ce que je voulais montrer ici c’était l’aliénation, l’esclavagisme que certains hommes peuvent exercer sur d’autres pour le pouvoir. L’exploitation pétrolière a engendré de nombreux conflits dans le monde. Je ne pense pas que l’exploitation des énergies renouvelables soit de cette ordre, même si les enjeux économiques, stratégiques existent. La répartition des ressources est différente que pour les énergies épuisables.

Sais-tu s’il existe encore des mineurs de par ce monde ? Et où ?

Il en existe encore, pour l’exploitation de l’uranium en Afrique, par exemple.

Totaliters. Comme je te le disais, ce nom rappelle automatiquement le groupe Total. Est-ce voulu ou non ?

Les Totaliters sont avant tout des petits êtres (elfes, lutins,…) qui ont mal tourné, ils ont été victimes de la recherche du pouvoir et se sont transformés en loups-garous. Ils sont donc devenus totalitaires.

Dans ta bd, on voit apparaître les Zuubees. Ce sont des animaux hybrides comme Boobee le chacureuil, mi-chat, mi-écureuil ou encore les baleigles, mi-baleines, mi-aigles. Comment t’est venue cette idée ?

Je cherchais à inventer d’autres animaux qui auraient muté ou qui seraient à l’origine des animaux terrestres… Je suis parti du mot bisous – transformé en beezuu et zuubees et après j’ai décliné toutes sortes d’animaux … En fait, ils sont tous très attachants et accompagnent les petits êtres. J’ai même entendu dire qu’ils leur seraient indispensables…

Dans le Schiozuchi, tout tourne autour de l’eau. Quel parallèle peut-on trouver entre les moulins algues, les canaux, les moulins cascade et ce qui existe dans notre monde ?

En effet, chaque construction que l’on trouve dans le Shiozuchi est le symbole d’un mécanisme terrestre en lien avec la force hydraulique : les moulinalgues ou moulins algues m’ont été inspiré par des plantes qui existent réellement et qui se servent de la force hydraulique pour croître, les canaux étaient l’occasion pour moi d’évoquer les passes à poissons, et enfin, les moulins ascenseurs sont là pour rappeler le principe des écluses.

Selon toi, si nous prenons un virage à 90 degrés et nous abandonnons les énergies fossiles pour les énergies renouvelables, crois-tu que comme l’Homasubi, nous retrouverons notre nature originelle avec toutes ses forêts, sa faune, sa flore, son air pur ? Si oui, combien de temps nous reste-t-il pour réagir ? Crois-tu vraiment que l’équilibre des énergies est encore possible ? N’avons-nous pas dépassé le point de non-retour ?

Non, je ne veux pas croire que l’Homme ait dépassé le point de non retour : nous avons un trésor et aujourd’hui des moyens technologiques au service de l’écologie. Nous pouvons renverser les choses. Quand je parle d’équilibre des énergies, il s’agit pour moi de considérer que les énergies renouvelables sont des solutions au même titre que les énergies fossiles et que si nous dépassons nos idées reçues sur l’environnement, tous, nous pouvons modifier nos comportements.

La planche 47 présente un condensé des énergies renouvelables. Quelle est leur place et leur situation dans le monde d’aujourd’hui ?

La page 47 montre en effet des mondes apaisés, équilibrés grâce au retour de l’énergie vitale. Le potentiel des énergies renouvelables est immense : sur tous les continents, on assiste à un développement important des énergies renouvelables.

Pour cette bd, as-tu reçu le soutien du Conseil Général de la Franche Comté ou d’autres institutions ? Pourquoi cette bd est-elle d’ailleurs née en Franche Comté ?

Nous avons reçu le soutien de l’ADEME nationale, l’Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie et du Conseil général du Jura. Cette Bd est née dans le Jura parce que le dessinateur et moi même travaillons au sein de cette association.

Qu’est-ce qu’Imprim’Vert ?

Le label Imprim’Vert est un label destiné aux imprimeries travaillant avec du papier recyclé.

Outre l’aspect écologique, quels avantages offrent aux industries du livre le papier 100% recyclable et l’encre végétale ?

Nous avons choisi de l’imprimer sur du papier P.E.F.C. qui garantit que les forêts dont est issu le papier sont gérées de façon durable et sont européennes. Le label P.E.F.C. a été décrié il y a quelques années, mais aujourd’hui c’est le seul qui garantit un compromis entre écologie et social.

Et pour finir, quel écho reçois-tu auprès du public ?

Les avis divergent. Cette bd s’adresse principalement aux jeunes adolescents, je dirais à partir de 9 ans, et je m’aperçois du décalage entre génération : les adultes trouvent en général la bd très dense, foisonnante, et ont un peu de mal avec les noms des mondes, tandis que les jeunes générations n’ont pas de mal à passer d’un univers à l’autre…

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