Nefs de Pangée (Les)

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Ce roman, au départ en trois parties qui se sont retrouvées mélangées en un seul volume, nous présente un monde étrange, dont la troisième nous fera découvrir (pardon pour le gâchage, qui n’affecte sans doute pas la lecture des épisodes précédents) qu’il s’agit d’une Terre assez éloignée dans l’avenir. Voici un des rares livres que je connaisse qui présente une double possibilité de lecture et d’appréciation : suivant les critères « rationnels » de la lecture de SF (mais je crois qu’un Cambell aurait pu le refuser, la crédibilité scientifique de cet avenir peut paraître contestable. Ttout au moins aurait-il exigé que le monde décrit ne prétende pas être une Terre future) et suivant les critères « littéraires » de la fantasy (en revanche la cohérence et l’intérêt de ce monde, sa vraisemblance, sont certains).

 

Nous découvrons donc un monde qui comporte un continent unique, Pangée. Ce continent est divisé en un certain nombre de pays. Les habitants, les ghioms, présentent certains points communs avec les humains, mais aussi des différences majeures. D’abord un comportement sexuel assez original, les femelles accumulant la semence de plusieurs mâles de types différents avant de créer, par leur volonté, un enfant qui reprendra des caractéristiques de plusieurs pères. Ensuite une organisation sociale basée sur la coopération et le volontariat, qui pourrait apparaître comme une utopie réalisée. Enfin, depuis plusieurs « cycles », d’une durée de vingt-cinq ans, une cérémonie de changement de cycle, la Chasse, assure quand elle réussit la cohésion entre les différentes contrées. Il s’agit d’envoyer une flotte sur l’océan, l’Unique, chasser et tuer une créature monstrueuse, l’Odalim. Mais la neuvième chasse a échoué et, afin d’unir les différents peuples, la cité la plus importante, Basel, commence à préparer la dixième Chasse qui devra unir tous les peuples, chacun envoyant plusieurs navires. Il faut choisir et former le commandant de la flotte, Bhaca (la référence à Achab n’est pas fortuite, mais il est très différent du héros de Melville) et le conteur, ici la conteuse, qui racontera la Chasse, Hammassi.

La préparation et le déroulement de la Chasse constituent donc le premier récit de ce roman. Mais s’y entremêle un deuxième récit, celui de l’ascension d’un nouveau guide, le Promis, qui va changer complètement les règles de la société ghiom.

Et, alors que la Chasse trouve sa conclusion, l’apparition d’une nouvelle menace : les Flottants, peuple des mers, d’une autre espèce que les ghioms, entreprennent l’invasion de Pangée. Ce sont d’ailleurs eux qui donneront l’explication de comment ce monde descend du nôtre. Hammassi passera dans cette dernière partie du roman du rôle de témoin à celui d’acteur essentiel et c’est elle qui conclura l’histoire. Ou peut-être faut-il dire la trilogie en un volume, puisque trois sous-romans s’intercalent, chacun méritant sa part d’intérêt.

 

Christian Chavassieux est auteur de romans, recueils de poèmes, essais et pièces de théâtre et c’est avec un bagage de littérateur blanc qu’il attaque l’imaginaire.Il se différencie toutefois profondément de ces auteurs de « blanche » qui récusent l’étiquette SF et Fantasy quand ils attaquent, sans culture de ces branches, un thème d’anticipation ou de fantastique déjà ressassé. Lui connait, apprécie l’imaginaire et écrit une œuvre qui s’insère parfaitement dans la collection où elle est publiée. Il sait nous faire partager la manière de penser de ces ghioms, allant jusqu’à utiliser leur grammaire pour les pluriels, et fournit en fin de roman glossaire, géographie, personnages, vocabulaire et notions qui assurent la cohérence de son monde. Non nécessaires en cours de lecture car, au fur et à mesure de leurs apparitions, les notions paraissent claires, ces ajouts en fin de roman fournissent la possibilité de réorganiser ses souvenirs. Il a certainement pensé ce monde comme un monde de fantasy, même si dénué d’irrationnel (magie ou dieux), et la présentation du roman en découle.

 

Seul reproche de ma part : la carte, à laquelle j’ai voulu me référer en cours de lecture à plusieurs reprises, est difficilement lisible. Un dessin plus grand et plié aurait été nécessaire, je ne saurais trop conseiller au lecteur de s’en faire une photocopie en *2, voire d’annoter cette photocopie.

 

Les nefs de Pangée, de Christian Chavassieux, Mnémos collection Dédales 201, 493 p., couverture peinture de John Martin, ISBN 978-2-35408-327-4

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