Les révoltés de l'an 2000 de Narciso Ibanez Serrador

Réalisateur: 

Bonjour à toutes et à tous.


Un film fantastique aujourd’hui, vraiment étonnant, bien que s’inscrivant parfaitement dans la production d’imaginaire des années 70.

Il s’agit d’un film espagnol de 1976, Les révoltés de l’an 2000, réalisé par Narciso Ibanez Serrador, distribué en dvd par Wild Side Vidéo.

En vacances dans l’Espagne déjà touristique des années 70, mais peut-être est-elle celle des années 2000 du tout béton, un couple d’Anglais décide de rejoindre une île isolée afin de passer un agréable séjour. Lorsqu’ils débarquent du petit canot à moteur loué à un pêcheur, ils ne trouvent plus que des enfants silencieux, qui refusent de leur parler. Pas trop inquiets puisque la population a pour tradition de laisser durant une journée le village pour se rendre de l’autre côté de l’ile sur la plage, ils s’installent dans un café.

Mais bientôt, voilà qu’une gamine frappe à mort un vieillard avec sa canne…


Je ne vous raconte pas la suite pour ne pas gâcher votre plaisir, mais tout s’enchaîne sous un grand soleil jusqu’à l’issue finale… Même les gardes-côtes débarquant sur l’ile n’échapperont pas à la volonté destructrice des enfants, incapables eux aussi d’admettre l’inadmissible, les enfants tuent les adultes.

Le récit progresse vraiment très bien, avec cette absence de fausse narration paresseuse qui caractérise les mauvais films. Les personnages agissent comme des adultes agiraient en pareil cas, selon les objets disponibles, les lieux où ils évoluent.

Cette logique des actions du couple pour tenter d’échapper à la volonté assassine des enfants apporte à ce conte enfantin horrifique le fond de vérité nécessaire pour que le spectateur y croie pleinement.

L’autre grande caractéristique du film est bien entendu la singularité de la lumière, cette blancheur des maisons, ce paysage insulaire paradisiaque, filmé en pleine journée, sous un beau soleil.

Film lumineux donc, à l’opposé complet des conventions claustrophobes et d’obscurité des films habituels de terreur. Pourtant, la pleine lumière du soleil terrifie tout autant…

Cette très bonne utilisation du lieu sert vraiment Les Révoltés de l’an 2000, le rend unique et véritablement pensé cinématographiquement.


Ce qui se confirme avec le long générique de début, près de six minutes pour le moins, fait d’images d’actualités d’archives atroces, montrant les enfants victimes des camps de concentration, de guerres. Il nous met tout de suite dans l’ambiance, justifiant presque dans notre esprit ce qui va suivre, la vengeance des enfants sur leurs tortionnaires.

Vengeance qui paradoxalement va se produire sur une petite île où les enfants ont la plus belle vie possible à jouer, nager sans contraintes…

Allégorie horrifique de renversement des valeurs, Les révoltés de l’an 2000 se situe donc dans la même veine narrative qu’un autre film très réussi également, français celui-là, Demain les Mômes, réalisé par Jean Pourtalé en 1975, même si l’explication du comportement des enfants est plus approfondie. Tous les adultes ou presque sont morts, tués par un phénomène mystérieux. Livrés à eux-mêmes, les enfants ne supportent plus la présence d’adultes survivants qui persistent à vouloir jouer aux parents. Cela finira mal également.

Voici sa chronique de 2010 sur le blog 36.


Décidément, la décennie 1970 reste vraiment un moment unique dans la création, la décennie où véritablement l’on a pensé, imaginé et raconté des histoires d’une manière différente, remettant en cause les fondements même de la société.

Car il ne s’agit plus de critiquer, d’améliorer ou de travestir, mais bien d’imaginer d’autre mondes possibles. Démarche qui se retrouve beaucoup plus rarement de nos jours.

Pour avoir déjà pas mal visionné de bons films des années 70, le phénomène est net, tranchant, radical.

Nous sommes bien avec Les révoltés de l’an 2000 dans un monde différent, où les enfants commettent à leur tour les horreurs que les adultes leur font subir sans réticence. Film vengeur donc, où le destin de l’Humanité est de rester éternellement jeune, sans personne pour travailler, construire et détruire.

Un long métrage de Narciso Ibanez Serrador qui fait peur, ou plutôt nous révulse à vrai dire, tant l’enfance est dans nos esprits associé à l’innocence...

Et maintenant quelques images supplémentaires...









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