Servante écarlate (La)

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Dans la république imaginaire de Galaad, quelque part entre les Etats-Unis et le Canada, le régime politique totalitaire mis en place a relégué les femmes au rang d’utilité. Tous leurs droits leur ont été retirés. Elles sont utilisées à des tâches subalternes. Et celles qui sont encore jeunes et fertiles rabaissées au rang de mères porteuses, esclaves d’une obligation sexuelle qui leur impose des rapports avec un maître sous l’oeil vigilant de la femme de celui-ci, jusqu’à réussir à concevoir un enfant. Ces femmes ne doivent communiquer avec personne. Elles sont toutes habillées de rouge, avec un voile destiné à dissimuler leur visage aux yeux du monde. Defred est l’une d’entre elles. On lui a tout pris : son amour, son enfant, ses rêves d’avenir, ses études, jusqu’à son nom. Soumise à une éducation stricte de la part des « tantes », elle n’a le droit de sortir que pour aller faire quelques courses alimentaires dans des marchés surveillés par des militaires et où tout se négocie avec des tickets de rationnement. Et, régulièrement, d’accepter de se coucher pour subir les assauts sexuels d’un homme âgé dans le but unique de réussir à procréer. Defred se souvient de son passé, de ce qu’elle faisait et de qui elle était avant. Avec le secret espoir de parvenir un jour à retrouver sa liberté.

 

Le dictionnaire Larousse donne du mot dystopie la définition suivante: « Société imaginaire régie par un pouvoir totalitaire ou une idéologie néfaste, telle que la conçoit un auteur donné ». Alors certes, La servante écarlate est une dystopie, mais ce qui la rend plus troublante, plus crédible, c’est qu’elle s’appuie sur nombre de régimes totalitaires passés ou présents : on pense forcément à l’occupation allemande durant la Seconde Guerre mondiale, mais aussi à certaines de ces monarchies du Moyen-Orient rabaissant la femme avec quasiment aucun droit. Le roman nous renvoie également au fait que les droits des femmes ne sont pas gravés dans le marbre depuis si longtemps. Si l’auteure ne donne aucune date précise, beaucoup d’éléments disséminés dans le texte nous permettent d’imaginer que l’histoire se déroule à une époque très actuelle. Dans cet univers dominé par quelques hommes, la moindre rébellion, la moindre remarque d’une femme peut lui valoir aussitôt une déportation dans des régions reculées, afin de participer à la dépollution des sols. Elles meurent ainsi rapidement sous les effets de la toxicité, toxicité responsable en grande partie de la baisse de fertilité. Comme l’explique Defred tout au long du récit, la femme n’a plus droit à rien. Elle n’a pas accès à l’éducation, à la culture, à l’amusement, au plaisir. La scène où elle explique qu’elle garde un peu de beurre pour mettre sur le visage et garder une peau douce est assez explicite à plus d’un titre : pas de soins de beauté, elle a honte de ses sous-vêtements, honte de ses poils qu’elle ne peut retirer (et qui est une forme de diktat de l’ancienne société). Quant à son nom, Margaret Atwood nous en livre l’explication : le « de » désigne l’appartenance, la propriété, suivi du prénom du propriétaire. Le personnage central appartient donc à Fred…

La servante écarlate est une réussite puisqu’il nous oblige à nous poser des questions sur les réalités d’un totalitarisme supprimant les droits les plus fondamentaux. En préface, il est précisé que le roman a bénéficié d’une nouvelle traduction, remplaçant entre autres le "nous "par le "on". J’avoue que même si je ne suis pas adepte du "on" justement, ici il ne nuit absolument pas au récit, peut-être lui apporte-t-il un semblant de jeunesse, puisqu’il est plus facile d’imaginer alors les servantes comme de très jeunes femmes à peine sorties de l’ère post-bac.

Je remercie infiniment les éditions Robert Laffont Pavillon Poche pour leur confiance.

Margaret Atwood - La servante écarlate - Editions Pavillon Poche/ Robert Laffont - janvier 2021, 12,50€

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