De sang et d’encre

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Quand Aaron Levy, jeune étudiant plein de fougue arrogante, se trouve amené à collaborer avec Helen Watt, la très sèche et éminente experte en manuscrits hébraïques, il ne mesure pas dans quelles découvertes historiques va l’entraîner cette alliance improbable. C’est que des documents datant du XVIIe siècle ont été retrouvés dans une distinguée propriété anglaise. Le genre de papiers qu’on manipule en retenant son souffle et après avoir enfilé soigneusement ses gants de rat d’archives. Bientôt nos deux chercheurs mettent à jour toute une correspondance épistolaire qui vient éclairer d’un jour nouveau le statut de la communauté juive à travers le sort de Portugais exilés à Londres.

C’est avec un souci de la restitution historique certain que le présent roman retrace la destinée de ces écritures croisées, en faisant voyager le lecteur à travers l’Europe des penseurs et rabbins. Sur fond de peste et de débats politiques internationaux, il met en scène l’épopée intime de personnages bien trempés, qui traverse aussi le XVIIe siècle pour trouver écho de nos jours dans les atermoiements amoureux d’Aaron et les comptes que règle Helen Watt avec sa propre mémoire.

Au-delà de ces recoupements d’une époque à l’autre et de ces sensibilités toutes attachantes, soulignons la destinée de la véritable héroïne de cette histoire qu’est Ester : jeune scribe dissimulée sous un pseudonyme, cette féministe avant-gardiste ose, en pleine persécution de sa communauté religieuse et à l’heure où Spinoza se cache, signer sa vie durant, des missives audacieuses pour disserter « entre hommes » avec tel ou tel philosophe sur les derniers sujets métaphysiques en vogue.

Un sensible hommage aux combats féministes de celles qui voulaient, il y a plus de trois siècles, narguer l’impératif catégorique : « sois belle et tais-toi ».

 

De sang et d’encre par Rachel Kadish, Cherche midi, mai 2020, 23€

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