Bug

Réalisateur: 

L’antre de la folie



Traqués

Agnès vit seule dans un motel sordide et travaille comme barmaid dans un bar lesbien. Elle est hantée par le souvenir de son fils, qui a mystérieusement disparu plusieurs années auparavant, alors qu’elle faisait des courses avec lui dans un supermarché, fils dont la police n’a jamais pu retrouver la moindre place. Depuis ce tragique événement, elle est littéralement rongée par un sentiment de culpabilité. Alors qu’elle est déjà solitaire et dépressive, elle est aussi, depuis peu, harcelée par de mystérieux appels téléphoniques anonymes mais qui semblent apparemment être l’œuvre de Jerry, son ex-mari violent récemment sorti de prison.

Un soir, sa seule amie passe chez elle et lui présente Peter, un homme étrange et taciturne, dont elle vient tout juste de faire la connaissance. Cet inconnu n’ayant nulle part où loger, Agnès finit par lui proposer de l’héberger chez elle pendant un temps. Lorsque ce dernier prend résolument sa défense au cours d’une altercation l’opposant violemment à son ex-mari venu de façon impromptue lui dérober de l’argent, Agnès le considère désormais comme son “sauveur”. Les deux âmes en peine s’engagent alors résolument dans une relation intense et fusionnelle.

Obsession


Peu de temps après s’être installé chez Agnès, Peter commence à ressentir de violentes démangeaisons. Cela devient carrément une obsession et son étrange comportement prend rapidement une tournure particulièrement inquiétante lorsqu’il affirme être victime d’une attaque d’insectes microscopiques qui se seraient installés sous sa peau pour y pondre leurs œufs.

En tant qu’ancien soldat ayant participé à l’opération “Tempête du Désert” pendant la 1ère guerre du Golfe, Peter en arrive même à se demander si cela ne serait pas le gouvernement américain qui aurait implanté ces horribles bestioles sous sa peau dans le cadre d’une expérience scientifique secrète dont il aurait été le cobaye, à son insu.

Si, vu de l’extérieur, Peter pourrait n’être perçu que comme un schizophrène paranoïaque, en proie à d’horribles hallucinations, qui va jusqu’à s’auto-mutiler pour tenter d’extirper les milliers insectes qu’il est persuadé avoir sous sa peau, pour Agnès, il représente son héros, celui qui la défend lorsque son ex-mari s’en prend physiquement à elle. Elle a l’impression qu’il est le seul à vraiment pouvoir la comprendre. Elle s’accroche alors à lui comme à une bouée de sauvetage. Petit à petit, la “folie” de Peter devient, en quelque sorte, contagieuse pour Agnès et, comme ils sont absolument les seuls à être capables de voir ces fameux insectes, ils finissent par s’isoler du monde extérieur et se barricadent dans leur sinistre chambre de motel qu’ils calfeutrent avec tout ce qu’ils pensent pouvoir les mettre à l’abri de l’invasion de ces insectes.

Dans la tête de William Friedkin



Dès les premières images, le spectateur se retrouve au cœur de cette histoire peu banale, tant dans le fond que dans la forme. L’intrigue oscille sans cesse sur le “fil du rasoir” entre réalité potentielle et délires paranoïaques. Dans une ambiance moite et un huis clos, de plus en plus restreint (la chambre de motel ouverte sur le monde extérieur finissant par devenir un camp retranché), on s’interroge sans cesse sur cette histoire d’amour torturée de deux personnages en pleine dérive existentielle.

Qui est Peter ? Un ancien soldat victime du « Syndrome de la Guerre du Golfe », un cobaye ayant été soumis à une “expérience interdite” conçue par des militaires mal intentionnés, un aliéné qui s’est échappé d’un hôpital psychiatrique, voire carrément une combinaison des trois… Mais alors comment se fait-il qu’Agnès soit également atteinte du même mal et que, tous deux soient les seuls à voir ces fameux insectes ? Voilà, l’atout majeur de ce film hors normes puisque le spectateur est entièrement livré à son imagination, plus ou moins débordante, suivant les individus. Réalité tragique ou expression d’une folie furieuse ? A chacun de se faire sa propre idée sur le sujet car l’ambiance générale laisse sciemment supposer ce que chaque spectateur voudra bien y voir.

En raison du huis clos, le casting très restreint ne comprend que 5 personnages et l’action se déroule quasi exclusivement dans la petite chambre d’un motel minable et isolé. Au fil du temps qui passe, on assiste aux incroyables transformations, tant physiques que psychologiques, des deux principaux protagonistes. Vers la fin, le film bascule carrément dans le gore (avec quelques séquences d’automutilation bien sanglantes dont celle, difficilement supportable, de l’arrachage de dents). Si on ne peut que saluer l’extraordinaire prestation d’acteurs d’Ashley Judd et de Michael Shannon, dans leur interprétation respective d’Agnès et de Peter, il n’en reste pas moins que Bug souffre quand même du manque d’action et de la “théâtralisation” qui passent difficilement sur grand écran malgré la mise en scène de Friedkin (utilisation de zooms brutaux, de décadrages, …) pour tenter de palier au problème épineux posé par le huis clos. Le comble de l’histoire, c’est qu’on ne verra jamais les fameux insectes, on apercevra seulement quelque chose d’indéfinissable sous la lentille d’un microscope. Au même titre que les deux principaux protagonistes, le spectateur se retrouve plongé au sein d’une expérience purement viscérale.

Bug

Réalisation : William Friedkin

Avec : Ashley Judd, Michael Shannon, Lynn Collins, Brian F. O’Byrne, Harry Connick Jr.

Sortie le 21 février

Durée : 1 h 40

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