Harmoniques célestes (Les)

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Sixième tome de recueils de cet auteur à la fois phare et effacé de l’imaginaire français, les harmoniques célestes va prendre le lecteur à contrepied de ce à quoi il s’attend. Car en six nouvelles vous allez vibrer, trembler mais aussi vous émouvoir devant cette plume inimitable. J’avais peu d’ouvrage incluant des nouvelles de Jean-Claude Dunyach avant de me plonger dans ce recueil et désormais il va falloir que je me procure les précédents tant cette lecture fut une révélation pour moi.

La couverture de Gilles Francescano n’est, pour le coup, vraiment pas dans mes goûts. Je n’en dirais trop rien car je la trouve brouillonne et s’étendre sur le sujet ne servirait à rien.

La quatrième de couverture, signée Ayerdhal est nettement plus alléchante :

« L’actualité est là pour nous rappeler que rien n’est inamovible et que tout a une fin, à commencer par l’être humain dans ce qu’il est au fil de sa propre histoire et dans ce qu’il adviendra de lui dans l’Histoire tout court. L’actualité est impitoyable. Jean-Claude Dunyach aussi. Qu’il traite du premier amour, de la maladie, de la mort, de l’écosystème Terre, de l’avenir, il écrit nos peurs, nos fantasmes, nos ambitions, nos limites, nos vilenies petites et grandes, bref il parle de nous, hommes, femmes, enfants, tels que nous nous voyons quand nous prenons le temps de nous regarder ou quand la vie ne nous laisse plus le choix, et il nous dit sans fard qu’il est notre semblable. Avec tendresse, avec espoir, avec malice, avec cette plume d’orfèvre qui plie, déplie, replie les origamis pour mettre l’univers en équation, parce qu’on ne peut pas tourner définitivement le dos à la mer. Ayerdhal. »

Le lecteur commence directement dans le vif du sujet, ici pas de préambule long et soporifique. La nouvelle est tout ce qui compte et l’auteur nous fait entrer directement dans son univers. La nouvelle ayant donnée son nom au recueil est la toute première et finalement la meilleure de ce recueil. Les harmoniques célestes est un texte de pure SF qui pourrait sembler par moment tomber dans les travers de la hard-science mais cela n’est pas le cas. Prenant, ce texte nous emmène en compagnie d’un ancien médecin spécialisé dans les expériences de mort imminente. Il découvre le moyen de faire vivre à chacun le paradis qu’il voudrait pour son trépas. Mais Mademoiselle lui demande une tâche impossible alors que lui souhaite juste oublier son passé, le noyer dans les atolls azurs.

Le second texte La fin des Cerisiers parait finalement un peu fade au début tant le lecteur est séduit par le précédent. Mais cette nouvelle a également de quoi se défendre dans le genre fantastique. Ce scénariste américain qui débarque au Japon pour tourner un film et qui se voit contraint d’assister à des scènes qui font froid dans le dos est réellement impressionnante. Ce qui surprend le plus le lecteur c’est la capacité de l’auteur à faire dégénérer un petit rien en texte d’imaginaire.

Les cœurs silencieux est un texte éminemment poétique de bout en bout. L’idée d’une pilule pouvant rendre tout un chacun plus empathique et la manière dont son inventeur vit sa vie sont émouvants. Encore une fois l’idée de la mort va être au centre du texte mais malheureusement je ne peux pas vous en dire beaucoup plus sans méchamment déflorer l’histoire, je vais donc m’arrêter là, mais lisez ce texte avec attention et vous prendrez un grande leçon d’humanité.

Replis sur soie est un autre exemple de ce qu’un esprit génial peut faire d’un petit rien. Ce texte est difficile à définir car il appartient légèrement aux genres de la SF et du fantastique. L’art et la manière pour un homme de se retrouver à partir d’un petit rien à avoir un destin mettant en jeu des univers entiers, ou du moins des expressions parallèles de lui… Impressionnant de maîtrise, ce texte séduira tous les amateurs de textes profonds et pointus.

Aime ton ennemi est une nouvelle beaucoup plus écologique. Je ne sais trop comment décrire cette histoire car elle est assez particulière, bien qu’emplie de profondes réflexions sur l’humain et son impact. La plume de Jean-Claude sait en tout cas alterner ici dureté et douceur pour parvenir à la perfection littéraire.

Et pour terminer, c’est une histoire de « fantômes » qui nous est proposé. Visiteur secret est le texte le plus vivant du recueil, probablement du fait de l’âge de la narratrice qui semble assez jeune. Tout en faisant froid dans le dos, cette nouvelle intrigue. Rédigée dans un style très vivant, le lecteur ne sait à quoi s’en tenir jusqu’au dénouement, qui vient assez vite, le texte étant assez court.

Les harmoniques célestes est donc un excellent recueil de nouvelles mélangeant les genres avec un talent consommé. Aucun texte n’est venu diminuer la qualité d’ensemble et l’alternance entre textes inédits et rééditions est intéressant. Selon moi la meilleure nouvelle est l’éponyme du recueil qui a vraiment su me plonger dans un univers différent, ce qui n’est pas évident en quelques poignées de pages. Je ne peux donc que vous conseiller de vous jeter sur ce recueil peu onéreux afin de voir de quoi je parle quand je vous dis que Jean-Claude Dunyach est pour moi au panthéon des auteurs d’Imaginaire…

Jean-Claude Dunyach, Les harmoniques célestes, Illustration : Gilles Francescano, 146 p., L’Atalante

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